Après trois ans d’exil, l’opposant Moïse Katumbi est rentré en RDC. Son avion s’est posé dans son fief de Lubumbashi, où plusieurs milliers de personnes l’ont accueilli et où il doit tenir un meeting lundi soir.
Tout de blanc vêtu, arborant un large sourire, celui que l’on surnomme ici « le Chairman » est bel et bien de retour dans son fief de Lubumbashi, chef-lieu de la province du Haut-Katanga, dont il fut le gouverneur lorsqu’elle était encore le Katanga. Son jet privé s’est posé à 11 h45 locales à l’aéroport international de Luano, où l’attendaient plusieurs responsables de la coalition Lamuka – dont il est le coordinateur pour quelques semaines encore. Martin Fayulu, Adolphe Muzito, Jean-Pierre Bemba et Freddy Matungulu, les ténors de la coalition, se sont fait représenter.
À bord d’un Falcon 7X parti dans la matinée de Lusaka, en Zambie, Moïse Katumbi a fait le voyage accompagné par ses fidèles : Olivier Kamitatu, directeur de cabinet et porte-parole du leader d’Ensemble pour le Changement ; Francis Kalombo, ancien chef de la ligue des jeunes du PPRD, le parti de Joseph Kabila, qui a pris le chemin de l’exil en même temps que lui, en 2015 ; le Sud-Africain Kenneth McLeod, associé de toujours au sein de la Mining Company Katanga (MCK) ou encore le Français François Hurstel, patron de Concerto – cabinet de relations publiques – et conseiller de Moïse Katumbi.
Salomon Idi, le grand absent
Salomon Idi Kalonda Della, directeur financier du TP Mazembe et conseiller politique de l’opposant, n’a pu, pour sa part, être du voyage. Malgré des demandes répétées auprès des autorités, il n’a pu obtenir son passeport à temps.
Triomphe de la vérité
« La vérité, c’est comme l’huile que l’on veut noyer mais qui finit toujours par triompher », a lancé Moïse Katumbi à sa descente d’avion, alors que ses partisans, agitant des mouchoirs blancs, et les nombreux journalistes présents prenaient d’assaut le tarmac. « Je suis dans la joie ! Papa est là », a lancé l’un des fils de l’opposant, pris dans la cohue au pied de l’avion.
« Quatre ans après, c’est la joie. L’exil, ce n’est pas facile », a lâché pour sa part Francis Kalombo. « Nous remercions le peuple congolais pour la lutte. Nos pensées [vont] à ceux qui ont perdu la vie pour que la situation change », a-t-il ajouté.
Les attentes de la population
Beaucoup d’espoirs reposent désormais sur les épaules de celui qu’on surnomme ‘’ Valeur ajoutée, Muana Maman Maria’’. Juste après son retour, la population espère à un lendemain meilleur. Des chômeurs croient à l’emploi : Michel Ngoy, chimiste de son état pense pouvoir retrouver du travail. Une femme ménagère attend la baisse du prix de la farine de mais. Les supporteurs de Mazembe ne sont pas en reste. Ces derniers croient glaner d’autres titres.
Après trois ans d’exil, l’opposant congolais est rentré à Lubumbashi, lundi 20 mai. Un retour inimaginable sous Joseph Kabila et signe de la détente observée dans le paysage politique depuis l’arrivée de Félix Tshisekedi. Comment Moïse Katumbi va-t-il se positionner ? Quel rôle va-t-il jouer dans l’opposition ? Notre envoyée spéciale s’est entretenue avec lui.
Malgré son retour en RDC, Moïse Katumbi l’assure : il ne convoite aucun poste au gouvernement et sa place est bel et bien dans l’opposition. Une opposition « républicaine », mais « stricte ». Il se pose ainsi en « sentinelle du peuple congolais ».
« Ce qui est important pour moi, c’est que le nouveau président puisse changer ce pays. Est-ce qu’il va oublier le peuple ? Je ne crois pas, affirme-t-il. Nous, nous sommes de l’opposition, nous allons l’aider à changer le pays. Mais nous allons condamner là où il faut condamner. Nous serons une opposition exigeante. »
Un message qui s’adresse également au tout nouveau Premier ministre nommé lundi, Sylvestre Ilunga Ilunkamba, qu’il a bien connu du temps où il était gouverneur de l’ex-Katanga. « C’est quelqu’un de bien, c’est un grand bosseur, estime-t-il. J’espère qu’il va écouter la population, l’aider aussi à sortir de la médiocrité. »
Quel avenir pour Lamuka ?
À peine rentré d’exil, et comme il l’avait fait à l’automne 2015 peu avant sa disgrâce, Moïse Katumbi met aussi en garde les autorités du pays contre toute velléité de modifier la Constitution. « Ils veulent toucher à la Constitution, aller au suffrage indirect pour la présidentielle. Nous ne serons jamais d’accord avec ça, prévient-il. La population congolaise veille à ça, et nous tous de l’opposition nous n’accepterons jamais ça. »
Comment compte-t-il s’y prendre sans disposer d’une majorité au Parlement ? « Le vrai Parlement c’est la population congolaise, répond Moïse Katumbi. Et ce ne sont pas des députés nommés qui vont nous faire peur. »
Et quel avenir pour la coalition Lamuka, dont il fait partie ? Aucun des leaders de cette coalition n’était présent lundi pour l’accueillir à Lubumbashi, même si plusieurs se sont fait représenter, dont Martin Fayulu.
Mais depuis quelques semaines leur positions divergent. Tandis que Moïse Katumbi plaide pour une opposition contructive, Martin Fayulu continue lui de revendiquer la victoire et de réclamer le départ de Félix Tshisekedi au nom de la vérité des urnes. Visiblement, tout le monde n’a pas la même vision des objectifs défendus par cette coalition.
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