Le Chand Baori, situé dans le village d’Abhaneri au Rajasthan en Inde, est l’un des plus impressionnants et fascinants monuments de l’architecture ancienne. Construit il y a plus de 1000 ans, ce puits à degrés se distingue non seulement par sa beauté esthétique, mais aussi par son ingéniosité fonctionnelle. Pourtant, il soulève une question intrigante.
Comment des artisans et des architectes de l’époque ont-ils pu réaliser une telle prouesse sans les connaissances modernes en géométrie, en mathématiques, en physique ou en ingénierie. À première vue, le Chand Baori est un exemple parfait de l’harmonie entre l’art et la fonctionnalité. Avec ses 3500 marches et sa profondeur de 30 mètres, il était conçu pour collecter et stocker l’eau.
Qui est un bien précieux dans une région aride. La construction de ce puits à degrés témoigne d’une compréhension intuitive de la gravité, des matériaux et de l’architecture qui, bien que n’étant pas codifiée dans les termes modernes, était profondément ancrée dans l’expérience et la tradition. Les artisans de l’époque utilisaient des méthodes empiriques basées sur l’observation et l’expérience.
Ils savaient comment travailler avec les matériaux locaux, comment les empiler pour créer des structures solides, et comment concevoir des espaces qui maximisaient l’accès à l’eau tout en minimisant l’évaporation. Ces connaissances, transmises de génération en génération, formaient un corpus de savoir-faire qui, bien que ne reposant pas sur des théories mathématiques abstraites, prouvait leur efficacité.
Le Chand Baori n’est pas seulement un exemple d’ingénierie; c’est aussi une œuvre d’art. Les motifs géométriques et les sculptures qui ornent ses murs révèlent une sensibilité esthétique qui transcende le simple pragmatisme. Ces éléments décoratifs confèrent au site une dimension spirituelle et culturelle, démontrant que l’art et la fonctionnalité peuvent coexister harmonieusement, même sans les outils de calcul modernes.
Ce monument pose une question fondamentale sur la nature des connaissances humaines. Peut-on vraiment parler de “savoir” si l’on ne s’appuie pas sur des concepts mathématiques ou scientifiques formalisés ? Le Chand Baori nous rappelle que l’ingéniosité humaine ne se limite pas à des formules et à des théorèmes.
Mais elle se nourrit également d’une compréhension intuitive du monde qui nous entoure. Le Chand Baori est un témoignage exceptionnel de la capacité humaine à créer des merveilles sans les outils modernes que nous considérons aujourd’hui comme indispensables.
Il incarne un savoir-faire ancestral qui défie les notions contemporaines de l’ingénierie et rappelle que l’innovation peut prendre de nombreuses formes. Ce monument nous invite à reconsidérer notre définition de l’intelligence et de la créativité, en célébrant la diversité des approches qui ont façonné notre histoire architecturale.
TEDDY MFITU
Polymathe, chercheur et écrivain / Consultant senior cabinet CICPAR













