La science est souvent perçue comme un bastion de vérité et de rationalité, une quête d’objectivité au service de l’humanité. Pourtant, derrière cette façade glorieuse se cache une réalité plus complexe : la science est un monopole. Non pas parce que l’instruction publique est défaillante, mais en raison de la nature même du savoir scientifique.
Ce monopole ne se limite pas à l’accès aux résultats, il s’étend à la compréhension des méthodes qui les sous-tendent. En d’autres termes, les profanes ne peuvent que croire, sans véritablement assimiler. La science moderne repose sur des méthodes rigoureuses, des protocoles expérimentaux, et une terminologie spécialisée.
Ces éléments, bien que fondamentaux, sont souvent inaccessibles à ceux qui ne sont pas formés à la recherche scientifique. En conséquence, même les résultats les plus impressionnants – qu’il s’agisse de découvertes médicales, de percées technologiques ou de théories cosmologiques – ne font que renforcer la distance entre les scientifiques et le grand public.
Cette situation engendre un paradoxe : alors que les avancées scientifiques devraient être une source de fierté collective, elles deviennent parfois des objets de méfiance ou d’incompréhension. Le profane est alors contraint de se reposer sur la foi envers l’autorité des experts. Cette dynamique crée un fossé qui alimente le scepticisme à l’égard de la science, car une croyance sans compréhension est, par nature, fragile.
Face à cette réalité, un impératif se dessine : l’explication. Il ne suffit pas de divulguer des résultats ou de partager des découvertes. Il est essentiel de décomposer les processus qui mènent à ces résultats, d’exposer les méthodes de recherche, les raisonnements, et les incertitudes qui les accompagnent. Cela nécessite une volonté sans relâche, un engagement à surmonter la fatigue et à ignorer les obstacles.
Les scientifiques doivent devenir des pédagogues, des communicateurs, des passeurs de savoir. Chaque conférence, chaque article, chaque interaction doit être l’occasion de démystifier la science. En expliquant, en expliquant encore et encore, on commence à construire des ponts entre le savoir scientifique et le public. Ce travail est aussi exigeant qu’essentiel.
Car il permet de transformer la croyance en compréhension. La démocratisation du savoir scientifique n’est pas une utopie, mais une nécessité. En rendant les méthodes accessibles, nous favorisons une culture de la curiosité et de l’esprit critique. Cela peut également conduire à une meilleure prise de décision collective.
Que ce soit dans le domaine de la santé publique, de l’environnement ou de l’innovation technologique. Les citoyens informés sont mieux équipés pour dialoguer avec les experts et participer aux débats qui façonnent notre avenir. La science, en tant que monopole de la connaissance, pose des défis considérables. Cependant, en l’expliquant sans relâche, nous pouvons transformer cette dynamique.
Ce n’est qu’en partageant la méthode et en éclairant le processus que nous pouvons véritablement émanciper la science de son statut d’autorité inaccessible. La mission des scientifiques, au-delà de la recherche, doit devenir celle d’éducateurs passionnés, conscients de l’importance de leur rôle dans l’évolution de la société. La science ne devrait pas être un royaume réservé ; elle doit être un trésor partagé.
TEDDY MFITU
Polymathe, chercheur et écrivain / Consultant senior cabinet CICPAR