Au cours de la dernière décennie, la RD Congo a été le théâtre d’un phénomène éducatif pour le moins déroutant : des taux de réussite stratosphériques aux examens d’État, qui soulèvent plus de questions qu’ils n’apportent de réponses. Alors que la qualité de l’enseignement s’érode lentement, les résultats publiés semblent, eux, défier toute logique.
Comment expliquer que des élèves, qui peinent à exprimer leurs pensées dans une langue de scolarisation, obtiennent des scores dépassant 90 % dans des matières telles que le Latin-Philo, la Pédagogie ou le Commercial et Administratif ? Pour comprendre cette situation, il est essentiel de s’interroger sur l’état actuel de l’éducation en RDC.
Les infrastructures scolaires sont souvent vétustes, les enseignants mal formés et les ressources pédagogiques insuffisantes. Dans ce contexte, il devient difficile de croire que les élèves puissent réellement maîtriser des matières aussi complexes. Les examens d’État, censés être une évaluation rigoureuse des compétences acquises, semblent désormais être une simple formalité.
La dégradation du niveau d’enseignement est palpable. De nombreux élèves sortent des écoles sans avoir acquis les fondamentaux, que ce soit en mathématiques, en français ou dans d’autres disciplines. Pourtant, ces mêmes élèves se retrouvent à recevoir des attestations de réussite qui leur donnent une illusion de compétence. Ce décalage entre la réalité du terrain et les chiffres affichés est troublant.
Les résultats des examens d’État en RDC soulèvent des interrogations sur la rigueur des évaluations. Comment se fait-il qu’un élève capable à peine de formuler une phrase correcte en français, langue officielle du pays, puisse obtenir un score de 91 % en Latin-Philo ? Ce phénomène ne peut être réduit à une simple question de chance ou de préparation.
Il témoigne d’un système éducatif qui semble avoir perdu de vue ses objectifs fondamentaux. Les causes de cette situation sont multiples. D’une part, il y a la pression exercée sur les établissements scolaires pour afficher des résultats positifs. Cette pression, souvent alimentée par des enjeux politiques et des intérêts personnels, conduit à des pratiques douteuses, comme la fraude ou la manipulation des résultats.
D’autre part, il existe un manque de transparence dans le processus d’évaluation, ce qui rend difficile la vérification de l’intégrité des résultats. Les conséquences de cette situation sont inquiétantes. En accordant des diplômes à des élèves qui n’ont pas les compétences nécessaires, on crée une génération d’inaptes intellectuels qui peinent à s’insérer sur le marché du travail.
Cela alimente le cycle de la pauvreté et du désespoir, et compromet l’avenir même du pays. Dans un monde de plus en plus compétitif, la RDC ne peut se permettre de négliger son système éducatif. Il est impératif de rétablir la confiance dans les examens d’État et de garantir que chaque élève soit évalué de manière juste et équitable.
Cela nécessitera des réformes audacieuses, un investissement dans la formation des enseignants, et une amélioration des infrastructures scolaires. Les résultats d’examens d’État en RDC, aussi impressionnants soient-ils en apparence, ne sont qu’un mirage qui cache une réalité beaucoup plus sombre. Il est temps de réévaluer notre approche de l’éducation et de poser les bonnes questions.
Quelles compétences voulons-nous réellement que nos élèves acquièrent ? Et comment pouvons-nous garantir que chaque diplôme délivré corresponde à une véritable maîtrise des connaissances ? Seule une réflexion honnête et critique pourra permettre à la RDC de sortir de cette spirale d’illusion et de construire un avenir éducatif solide et durable.
TEDDY MFITU
Polymathe, chercheur et écrivain / Consultant senior cabinet CICPAR












